Image à la une : David Plunkert – Looking back / looking forward
La charge cognitive, nous en avons tous entendu parler, mieux, nous y avons tous été soumis. Ici, nous allons voir comment mieux comprendre cette théorie et comment appliquer les principes qui vont permettre sa réduction.
Qu’est-ce que la charge cognitive ?
Théorie développée par John Sweller
La théorie de la charge cognitive a été introduite par un chercheur en psychologie de l’éducation : John Sweller. La question de départ est simple : la résolution de problèmes interfère-t-elle avec l’apprentissage ? Car chercher à résoudre un problème représente une tâche cognitive. Apprendre, c’est-à-dire modifier ses connaissances, en est une autre.
La résolution de problèmes est le moyen ; l’apprentissage est le but.
Public concerné : Toute personne intervenant dans la conception d’interface.
Durée : 10 jour(s)
Prix : 4 990 €
Prochaines dates : 7-8 et 14-15-16 octobre 2024 / 4-5 novembre 2024 / 4-5-6 décembre 2024
La charge cognitive : ressources, tâche & manière
La charge cognitive correspond à la quantité de ressources cognitives investies par un individu lors de la réalisation d’une tâche. Elle dépend :
- de la complexité de la tâche tels que le nombre d’éléments à traiter et à mettre en relation ;
- des ressources de l’individu tels que ses connaissances à propos de cette tâche ;
- de la manière dont la tâche est présentée.
Petit glossaire :
- Une tâche correspond à un but à atteindre dans un environnement au moyen de connaissances, c’est-à-dire d’actions (physiques) ou d’opérations (mentales) ;
- Un problème est une tâche qu’on ne sait pas réaliser ;
- Une connaissance est une trace du passé (action, opération, émotion, sensation) que l’on parvient à mobiliser alors même qu’on peut avoir oublié sa source ;
- Un savoir est une connaissance collective, partagée par un groupe humain, sur le fond comme sur la forme.
Intervention de John Sweller, père de la théorie de la charge cognitive :
Voici une présentation de John Sweller sur les implications de la charge cognitive dans l’éducation
Sans une compréhension de l’architecture cognitive humaine, l’enseignement est aveugle
Notre connaissance de la cognition humaine a considérablement progressé au cours des dernières décennies. Cette connaissance a des implications considérables pour la conception pédagogique, mais elle est presque inconnue des concepteurs pédagogiques. La théorie de la charge cognitive est une théorie de conception pédagogique basée sur notre connaissance de la cognition humaine. Cette théorie utilise les bases évolutives de l’architecture cognitive humaine pour concevoir des procédures pédagogiques. À leur tour, ces procédures sont testées à l’aide d’essais aléatoires et contrôlés. Dans cet exposé, je décrirai les aspects de la cognition humaine qui sont pertinents pour l’enseignement et je décrirai brièvement certaines des implications pédagogiques qui en découlent.
Les 3 types de charges cognitives selon Sweller
Source : What is Cognitive Load Theory? – David Weller
La charge cognitive intrinsèque
La charge cognitive intrinsèque fait référence à la complexité d’un sujet ou d’une information. Par exemple, une addition de deux chiffres a une charge cognitive intrinsèque inférieure à la plupart des divisions.
La charge cognitive extrinsèque
La charge cognitive extrinsèque prend en compte la qualité du matériel pédagogique. Il peut s’agir de la pertinence du contenu en relation avec un sujet, ou la complexité des termes dans une ressource pédagogique.
La charge essentielle (ou charge utile ou charge cognitive germane)
Cette charge cognitive représente le déclic. C’est le fameux moment où l’on se dit « Eureka ! ». Si un interlocuteur a déjà des connaissances sur un sujet stockées dans sa mémoire de travail, cela augmente considérablement la charge essentielle.
Cela met aussi l’accent sur l’importance de l’équilibre. Chaque charge cognitive doit être considérée de manière égale, afin que les interlocuteurs puissent transférer les connaissances avec succès dans leur mémoire à long terme. C’est le moment où l’interlocuteur ne se contente pas d’apprendre mais retient également de nouvelles informations à vie.
Source : Cerveau & Psycho
Réduire la charge cognitive : les 5 principes à appliquer
Ces principes se basent sur les aspects pratiques de la théorie de la charge cognitive.
Voir cette vidéo des principes de Mayer
Le principe de cohérence
Il suffit de supprimer des ressources pédagogiques toutes les informations qui ne sont pas nécessaires pour permettre à votre interlocuteur de se focaliser sur les parties essentielles.
Le principe de modalité
C’est souligner les informations les plus pertinentes en utilisant des caractères en gras, italique, flèches et autres graphiques. Aller vers les informations essentielles pour réduire la charge cognitive et augmenter les chances d’obtenir une charge essentielle élevée.
Le principe de redondance
C’est avoir une combinaison simplifiée et planifiée d’images, de textes et de narration afin de réduire la charge extrinsèque.
La contiguïté spatiale
La contiguïté spatiale encourage l’illustration des présentations avec des termes. C’est une façon simple de réduire la charge cognitive des interlocuteurs afin qu’ils ne dépensent pas d’énergie cognitive à associer les mots aux images correspondantes.
La contiguïté spatiale temporelle
La contiguïté temporelle a un lien avec la contiguïté spatiale puisqu’elle souligne l’importance de présenter des schémas, des termes et des images à un moment bien précis. Elle encourage la présentation simultanée d’images et de termes afin que les interlocuteurs puissent faire le lien entre ces deux choses dans leur mémoire de travail.
Charge cognitive & UX Design
Modèle mental
Lors de la conception d’un site web, l’utilisateur dispose d’un modèle mental du fonctionnement d’un site web à partir de son expérience passée. C’est la raison pour laquelle la conception d’un nouveau site ou la refonte de site avec une mise en page différente amène l’utilisateur à faire un effort pour se repérer dans cette nouvelle architecture. Cela augmente la charge cognitive mais également le coût d’interaction.
A contrario, une mise en page familière à l’utilisateur réduit sa charge cognitive.
Source : Ness Labs
Affordance et libellé
Nous avons tous vu la barre de navigation inférieure dans les applications mobiles. Pour en améliorer l’esthétique, certains concepteurs retirent le libellé des icônes de la barre de navigation. Or, pour qu’un utilisateur puisse saisir rapidement et sans réfléchir l’interaction potentielle, il est parfois nécessaire de communiquer sur cette interaction et donc de lui indiquer via une étiquette, un label ou une inscription ce qu’elle signifie.
Concevoir avec des affordances et des signifiants appropriés réduit la charge cognitive et maximise la convivialité.
Exemple d’affordance : le libellé « Start using it now ! » invite à utiliser l’offre proposée
Atomisation du contenu (chunking content)
Dans le domaine de la conception de l’expérience utilisateur, le “chunking” fait généralement référence à la décomposition du contenu en petites unités d’information distinctes. Cette atomisation joue un rôle très important dans la réduction de la charge cognitive.
Source : Diane Ries Blog
Conception visuelle
La conception visuelle joue également un rôle dans la charge cognitive. Exemple : l’utilisateur se trouve face à une image qui n’a aucun rapport avec son contenu, il se perd car cela entraîne une augmentation de la charge cognitive. En réduisant la charge cognitive, l’utilisateur peut accomplir sa tâche sans aucune frustration et ressentir de la satisfaction lors de l’utilisation de l’interface. Aussi, cela permet d’augmenter la valeur de votre produit.
Charge cognitive minimale = Utilisabilité maximale
Les techniques de visualisation UX réduisent (aussi) la charge cognitive des UX Designers
L’UX Mapping a connu de très nombreuses versions. Cette cartographie UX aide en effet les UX Designers à visualiser les informations, afin qu’ils puissent mieux les comprendre et agir en conséquence.
- Empathy Map : carte d’empathie vis-à-vis de l’état d’esprit de l’utilisateur
- Service Blueprint : fonctionnement du service pour l’utilisateur et l’entreprise
- Customer journey Map : focus sur l’interaction avec un service ou produit précis
Experience Map ou parcours utilisateur : vision générale d’une expérience complète du point de vue utilisateur
Voici la transcription de cette vidéo :
En tant que UX Designer, à peine avez-vous tourné le dos qu’un nouveau livrable UX apparaît. D’abord, nous avons eu les sitemaps et les Wireframes, maintenant nous avons les Journey map et les services Blueprint, mais aussi les diagrammes d’affinité. Cela peut être épuisant de savoir s’il faut utiliser la dernière et la meilleure technique de visualisation. Certaines de ces méthodes semblent assez complexes, mais au fond, ce sont toutes des approches différentes au même problème de base : faire sortir les informations de votre tête vers le monde où vous pouvez les voir et agir en conséquence.
L’UX s’efforce de minimiser la charge cognitive pour nos utilisateurs finaux, car lorsque les gens essaient de réfléchir à trop de choses en même temps, ils font des erreurs et négligent des informations importantes.
Les limitations de la charge cognitive s’appliquent aux concepteurs tout autant qu’aux utilisateurs finaux
C’est pourquoi l’externalisation des informations de conception est si utile. En mettant les concepts là où nous pouvons les voir d’un coup d’œil, nous sommes en mesure de les reconnaître et de les considérer sans avoir à les mémoriser. Cela laisse plus de ressources mentales disponibles pour l’analyse et la prise de décision. Toutes ces techniques de visualisation contribuent à réduire la charge cognitive, mais aucune d’entre elles ne constitue une solution magique qui résoudra tous les problèmes. Ce sont juste des modèles adaptés à certains types de défis UX. Quel que soit le format, rendez visible ce que vous ce que vous savez afin que vous puissiez mieux le comprendre et agir en conséquence.
Conclusion
La charge cognitive nous accompagne toute notre vie, de notre apprentissage scolaire aux prises de fonctions des différents métiers. En connaître les usages, les principes et en soulever les freins permet une meilleure posture pédagogique, d’apprentissage, de mémorisation, d’utilisation, d’utilisabilité, d’ergonomie, de navigation… La charge cognitive doit être prise en compte dans la conception UX. L’un des rôles de la stratégie UX est de la réduire pour le bien être de l’utilisateur. L’UX Designer, dans le choix de ses livrables par exemple, ne se soustrait pas aussi facilement à la charge cognitive. Charge à lui de savoir la réduire pour lui-même !
Bibliographie
Cognitive Load Theory: John Sweller – Springer; 2011e édition (7 avril 2011)
Au cours des 25 dernières années, la théorie de la charge cognitive est devenue l’une des principales théories mondiales de la conception pédagogique. Il fait l’objet de nombreuses recherches par de nombreux chercheurs en éducation et en psychologie et est familier à la plupart des concepteurs pédagogiques en exercice, en particulier aux concepteurs utilisant des technologies informatiques et connexes.
La théorie peut être divisée en deux aspects qui sont étroitement liés et s’influencent mutuellement : l’architecture cognitive humaine et les conceptions et prescriptions pédagogiques qui découlent de cette architecture. L’architecture cognitive est basée sur l’évolution biologique. La description de l’architecture cognitive humaine qui en résulte est nouvelle et, par conséquent, les conceptions pédagogiques qui découlent de l’architecture sont également nouvelles. Toutes les procédures pédagogiques sont régulièrement testées à l’aide d’expériences randomisées et contrôlées. Environ 1/3 du livre est consacré à l’architecture cognitive et à sa base évolutive avec 2/3 consacrés aux implications pédagogiques qui suivent, y compris l’enseignement basé sur la technologie.
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