Le design thinking est une approche de l’innovation centrée sur l’humain. C’est une méthode ou un process de conception globale, centré sur l’utilisateur (ou l’humain), en vue de réaliser des services ou produits innovants. Cette méthode d’innovation a plus de 50 ans d’existence.
Public concerné : Aucune prérequis n’est nécessaire pour cette formation.
Durée : 2 jour(s)
Prix : 2 500 €
Prochaines dates : 7-8 novembre 2024
Le design thinking permet de réaliser des produits ou des services « désirables par le consommateur, même s’il n’aurait jamais exprimé clairement un tel vœu, réalisables techniquement et viables économiquement », selon Véronique Hillen, doyenne à la Paris-Est d.school et directrice du département Génie industriel à l’École des Ponts, qui reprend là l’un des thèmes chers à Tim Brown, CEO de IDEO.
Pour des raisons pratiques, nous remplacerons parfois “Design thinking” par DT.
Cette vidéo pose les concepts-clés :
Vers une définition simple du Design Thinking ?
La définition du Design Thinking a beaucoup évolué depuis la création du concept. Globalement, il s’agit d’une méthode ou approche centrée sur l’utilisateur / humain et tournée vers l’innovation. Quel que soit le domaine d’application, l’empathie, la créativité, la co-création, l’itération et le droit à l’erreur sont au cœur de cette méthodologie d’innovation. L’objectif est de s’approprier les outils du design pour gérer des projets innovants et résoudre des problèmes, passés ou à venir. Cela permet de concevoir des produits et services innovants pour les utilisateurs, collaborateurs, consommateurs ou usagers.
“Design thinking isn’t a methode, it fundamentally changes the fabric of organization and your Business” David Kelley
Cette démarche a aussi la particularité d’entraîner une nouvelle organisation du travail en entreprise. Parfois confondu avec l’UX Design, le Design Thinking a surtout été conçu pour trouver des solutions à des problèmes sociaux et économiques. Tous deux intègrent une stratégie d’innovation axée sur les besoins de l’utilisateur.
Que signifie Design Thinking ?
Le Design Thinking a été traduit en français par « esprit design » ou « pensée design ». Il s’agit à la fois d’une méthode, d’un processus d’innovation et d’une vision spécifique du travail. En fait, cette démarche s’inspire de la pensée et de la boîte à outils des designers pour permettre à chacun d’être créatif et de participer à l’innovation. Il permet de résoudre toutes sortes de problèmes grâce à l’intelligence collective, y compris dans des domaines traditionnellement éloignés du design.
Méthodologie, process et mindset
« La plupart des gens font l’erreur de penser que le design, c’est l’apparence (…) Ce n’est pas comme ça que nous définissons le design. (…) Le design, c’est comment ça marche » Steve Jobs en 2003
S’il est difficile de donner une définition unique du Design Thinking, c’est notamment parce qu’il s’agit à la fois d’une méthodologie, d’un process et d’un état d’esprit. Il est fréquent, dans la littérature sur le sujet, d’associer DT, business et management. En effet, cette démarche ou méthode d’innovation rompt avec la gestion de projet linéaire, classique en entreprise.
Cycle de développement en V – Source : Christophe Moustier (Wikipédia)
Historiquement, son développement est directement lié à la place de plus en plus centrale donnée aux usages et à l’expérience par rapport à la technologie.
En voici les grands principes, présentés à l’occasion du #Good Morning UX #2 :
“ Échouer tôt, pour réussir plus vite “ – Tim Brown (IDEO)
Traditionnellement, la gestion de projet se base sur les possibilités technologiques et laisse le moins de place possible au risque. Pour simplifier, le but est de trouver des solutions à des problèmes techniques. Au contraire, le Design Thinking met en avant les usages de l’utilisateur ou du consommateur, le tâtonnement et l’expérience par l’erreur. Il ne s’agit pas seulement d’identifier des problèmes existants, mais aussi de répondre à des besoins qui ne sont pas forcément exprimés par les utilisateurs ou clients. La “pensée design” aide ainsi à s’adresser à des secteurs de marché qui n’avaient pas encore été identifiés.
“Learn From Failure” – Tim Brown (IDEO)
“Don’t think of it as failure, think of it as designing experiments through which you’re going to learn.” (Tim Brown)
Tim Brown (CEO IDEO), explique comment l’apprentissage par l’erreur est au coeur d’une méthode de design d’innovation.
“L’échec est un outil incroyablement puissant pour apprendre. Concevoir des expériences, des prototypes, des interactions et les tester est au cœur de la conception centrée sur l’humain. Donc, c’est une compréhension que tous ne vont pas travailler. Lorsque nous cherchons à résoudre de gros problèmes, nous sommes voués à l’échec. Mais si nous adoptons le bon état d’esprit (mindset), nous apprendrons inévitablement quelque chose de cet échec.
La conception centrée sur l’humain commence par un manque de connaissance de la solution à un problème donné. Ce n’est qu’en écoutant, en réfléchissant, en construisant et en affinant notre chemin vers une réponse que nous obtenons quelque chose qui fonctionnera pour les personnes que nous essayons de servir. L’échec est une partie inhérente du processus parce que nous n’obtiendrons jamais toutes les réponses pertinentes au premier essai. En fait, le faire correctement dès le premier essai n’est pas du tout l’objectif. Le but est de produire quelque chose via une première étape, puis l’utiliser pour continuer à apprendre, continuer à interroger et continuer à tester. Quand les concepteurs centrés sur l’humain parviennent à une réponse pertinente, c’est parce qu’ils se sont trompés en premier !”
Tim Brown (CEO IDEO)
Méthode, process ou état d’esprit : 50 ans d’histoire !
En France, le terme Design Thinking paraît récent et à la mode, mais sa naissance a quasiment 50 ans et ses origines, bien plus anciennes encore. En 1900, les designers Charles and Ray Eames pratiquaient déjà ce qu’ils appelaient “learning by doing” (“apprendre en faisant”).
Origine et développement du Design Thinking
Voici un bref historique avec ses principaux contributeurs :
- 1969 : l’économiste et sociologue Herbert A. Simon fait du design une manière de penser (« a way of thinking ») dans Sciences of the Artificial.
- 1973 : Robert McKim publie Experiences in Visual Thinking. Il y défend l’idée qu’utiliser les capacités d’analyse de l’hémisphère gauche du cerveau et la dimension créative de l’hémisphère droit permettent d’avoir une approche holistique d’un problème, et donc de trouver sa solution.
- 1980-1990 : inspiré par l’ouvrage de McKim, Rolf Faste, en donne une 1e définition dans ses cours à l’Université de Stanford. La place centrale des besoins de l’utilisateur et l’adoption d’un travail multidisciplinaire se précisent.
- 1987 : Peter G. Rowe, professeur à Harvard, publie Design Thinking. Cette pensée design est défendue en tant que méthode de conception de bâtiments et d’espaces publics utilisée par les urbanistes et les architectes.
- Années 1990 : David M. Kelley, fondateur de l’agence d’innovation IDEO, applique la démarche de pensée design au business (entreprises et industries).
- 1992 : Richard Buchanan publie son célèbre article : “Wicked Problems in Design Thinking”, présentant ce concept comme pouvant s’appliquer à presque tout, objet tangible ou système intangible. Selon lui, le designer apporte une façon unique d’aborder un problème et trouver des solutions.
- Des années 1990 à 2000 : Cette période inaugure à la fin des années 2000 le design comme “état d’esprit”. Tim Brown (actuel CEO d’IDEO) popularise le terme en 1999. Il affirme la vocation du Design Thinking à rassembler les besoins et désirs de l’utilisateur (ou du consommateur), les possibilités technologiques, et les objectifs économique de l’entreprise. (« Design Thinking is a method of meeting humans needs and desires in a technologically feasible and strategically viable way »).
- Années 2000 : diffusion à grande échelle aux Etats-Unis puis en Europe.
- 2004 : Publication dans BusinessWeek de l’article de Bruce Nussbaum qui fait la Une : ” The power of Design “. Le design y est présenté comme puissant levier d’innovation. “IDEO redefined good design by creating experiences, not just products. Now it’s changing the way companies innovate.”
- 2005 : David M. Kelley fonde la school à Standford
- 2007 : Vidéo par Tim Brown de “Strategie by Design : How design Thinking Builds Opportunities” et son ouvrage “Change by Design”
- 2008 : Tim Brown publie au sein de la Harvard Business Review un article intitulé “ Design Thinking ”
- 2010 à aujourd’hui : popularisation de cette approche dans le monde et diffusion en France depuis les années 2000 avec une accélération en 2010 suite à la traduction de l’ouvrage de Tim Brown : “Change by Design”.
Diffusion du Design Thinking en France
La pensée design a été enseignée initialement à l’École de Design de Stanford, mais on la trouve maintenant dans de nombreuses écoles, universités, centres de formation, agences et même entreprises. En France, les formations au Design Thinking sont toujours plus nombreuses (I-Lab à Toulon, le MOOC « Devenir entrepreneur de l’innovation par le Design Thinking » de l’EMLYON et Centrale Lyon, etc.). Néanmoins, la pensée design reste une notion polysémique et sujette à différentes interprétations.
La question de sa diffusion et de sa transmission est au cœur de la d School.
Véronique Hillen expose cette “confrontation” (structurelle et au niveau de l’individu) rencontrée dans la phase de diffusion du DT en France. C’est un choc d’une culture de l’exploitation face à une culture de l’exploration. Elle relève 5 résistances courantes :
- Nous avons toujours fait du DT : nous faisons des brainstormings et des focus group depuis 40 ans
- ça marche en Californie, mais cela ne marchera pas en France
- On n’a pas attendu le DT pour penser !
- Ces américains sont vraiment incroyables en marketing, mais comme d’habitude, il n’y a rien derrière
- On l’a toujours fait, mais avec ce buzzword, nos clients comprennent enfin ce que nous faisons
Différentes manières de décrire le design thinking
Lucy Kimbell, designer, affirme qu’il y a trois manières principales de le concevoir :
- En tant que style cognitif
- En tant que théorie du design
- En tant que ressource organisationnelle
Source : Rethinking Design Thinking (très intéressant car Lucy Kimbell mène dans cet article une réflexion de fond sur le DT)
Représentation de l’histoire du Design thinking
- Années 1960
- Science du design > conception participative (Participatory design)
- Herbert Simon, Host Rittel
- Années 1980
- Réflexions cognitives > design centré utilisateur (User-centered design)
- Bryan Lawson, Nigel Cross, Donald Schon, Donald Norman
- Années 1990
- Process et méthodes > Méta-design
- Richard Buchanan, Willam Rousse, Ezio Manzini
- Années 2000
- Etat d’esprit (mindset) > Service design > Design centré sur l’humain (human-centered design)
- Lucy Kimbell
Evolution of design thinking (infographie réalisée par Stéphanie Di Russo et citée dans l’article de Kobie Arayatakul)
La méthode du design Thinking : combien d’étapes ?
On l’a vu, il n’y a pas qu’une seule méthode de pensée Design, même si elles s’inspirent toutes d’une approche commune. Les différentes étapes sont l’expression des différences de méthode. Le nombre d’étapes en est donc un exemple flagrant.
7 étapes
Dans les années 80, Rolf Faste, directeur de la section design product de l’université de Stanford, énumère 7 étapes :
(via http://www.slow-design.fr/design-thinking-la-nouvelle-methode-a-la-mode/ )
- Définir : identifier le problème et le projet pouvant le régler.
- Rechercher : réunir l’ensemble de l’équipe (designers, experts en marketing, développeurs, etc.) et définir la problématique.
- Imaginer : phase de brainstorming où récolter des idées en encourageant les débats.
- Prototyper : élaboration des premiers prototypes et schémas.
- Sélectionner : Proposer aux participants de sélectionner la meilleure idée parmi celles proposées.
- Implémenter : le projet se concrétise et les ressources financières et humaines (qui fera quoi ?) se définissent.
- Apprendre : du client, c’est-à-dire lui montrer le résultat et l’améliorer en fonction de sa réaction.
5 étapes
Jeremy Gutsche ramène à 5 étapes :
- Définir
- Imaginer
- Synthétiser
- Prototyper
- Tester
Les 5 étapes du design d’innovation selon Jeremy Gutsche
Tout comme la d.school de l’université de Stanford qui ramène aussi le processus de co-création et co-fabrication à 5 étapes, en y ajoutant notamment l’empathie (se mettre à la place de l’utilisateur final ou du client). Ces 5 étapes sont aujourd’hui couramment utilisées au sein des organisations.
- L’empathie
- La définition
- L’idéation
- Les prototypes
- Les tests
Les 5 étapes du design d’innovation selon la d.school
6 étapes
Le Nielsen Norman Group propose 6 étapes en partant de sa définition :
“L’idéologie du design-thinking affirme qu’une approche pratique et centrée sur l’utilisateur de la résolution de problèmes peut mener à l’innovation, et que l’innovation peut mener à la différenciation et à un avantage concurrentiel. Cette approche pratique, centrée sur l’utilisateur, est définie par le processus de design thinking et comprend 6 phases distinctes, telles que définies et illustrées ci-dessous.”
Les 6 phases (ou 6 étapes) du design thinking selon le Nielsen Norman Group
- L’empathie
- La définition
- L’idéation
- Les prototypes
- Les tests
- L’implémentation
La flexibilité et la créativité sont particulièrement recommandées par le Nielsen Norman Group. Le graphique ci-dessous présente la dimension itérative dans le déploiement de cette méthode, non comme “process” à suivre strictement, mais comme “approche” ou “méthode” à adapter à chaque projet. L’article utilise une métaphore culinaire : “ne suivez pas à la lettre la recette, mais autorisez-vous à concevoir librement comme un chef en cuisine !”
6 étapes avec leurs itérations (Nielsen Norman Group)
3 étapes
Enfin, Tim Brown (IDEO) réduit le nombre à 3 grandes étapes :
- Inspiration : repérer le problème du client ou du non-client et la situation qui pourrait être améliorée grâce à l’observation du contexte et des comportements. C’est la phase d’étude ethnographique.
- Imagination (idéation) : générer ensemble des idées, les développer et les tester (brainstorming, utilisation de visuels, premiers prototypes…)
- Implémentation : le processus qui mène du projet à la fabrication du produit ou à la conception du service grâce au storytelling et à la simulation de l’expérience par exemple.
3 étapes pour simplifier le process (IDEO)
Le Design Thinking comme design d’innovation
On l’a vu, quel qu’en soit le nombre, ces étapes ne sont pas linéaires mais plutôt cycliques (itérations). À tout moment, il pourra être nécessaire de revenir à la phase “imagination” pour améliorer l’implémentation, ou à la phase “inspiration” pour trouver de meilleures idées, etc.
Trois critères pour savoir si une idée est valable (Tim Brown)
- La désirabilité : est-ce en adéquation avec les désirs et attentes des utilisateurs/consommateurs/clients ? (secteur de l’humain et des valeurs)
- La faisabilité : est-ce utile et réalisable par rapport au contexte ? (aspect technologique)
- La viabilité : est-ce susceptible de durer compte tenu du modèle économique ? (domaine du business)
La croisée de ces critères constitue ce qu’on appelle le Design d’innovation :
Le Design d’innovation se trouve à la convergence de 3 critères : désirabilité, faisabilité et viabilité (IDEO)
Une autre présentation de la convergence des 3 critères pour aboutir au Design d’innovation, ici illustré avec leur champs d’application : désirabilité (les personnes), faisabilité (la technologie) et viabilité (le business).
(IDEO)
Modèles et outils
À l’heure actuelle, diverses méthodologies sont utilisées sous forme de modèles ou outils. Le modèle en double diamant (Double diamond) formalisé par le Design Council (UK) est très courant, mais on trouve aussi le modèle en V, en spirale, Waterfall etc. En fait, il n’existe pas un mais plusieurs modèles de Design Thinking à suivre. Tout dépend du projet et du but poursuivi. Cependant, toutes ces techniques relèvent d’une approche expérimentale centrée utilisateur / humain et mettent l’intelligence collective au service de l’innovation.
Modèle en double diamant
Modèle en double diamant via Service Innovation & Design
Divisé en quatre phases distinctes
- Découvrir
- Définir
- Développer
- Livrer
Le Double Diamant est une simple carte visuelle du processus de conception.
Dans tous les processus créatifs, un certain nombre d’idées possibles sont créées («pensée divergente») avant de se raffiner et de se réduire à la meilleure idée («pensée convergente»), et cela peut être représenté sous forme de diamant. Mais le Double Diamant indique que cela se produit deux fois :
- Une fois pour confirmer la définition du problème
- Une fois autre pour créer la solution
L’une des plus grandes erreurs est d’omettre le diamant de gauche et de résoudre le mauvais problème. La définition d’une problématique à laquelle il faut répondre dans le second diamant est une étape cruciale à ne pas négliger!
Afin de découvrir quelles sont les meilleures idées, le processus de création est itératif. Cela signifie que les idées sont développées, testées et affinées un certain nombre de fois, avec des idées faibles abandonnées dans le processus. Ce cycle est une partie essentielle d’un bon design.
Les méthodes de conception pratiques – comme les journaux d’utilisateurs, la cartographie des trajets et les profils de personnages – permettent de faire passer un projet à travers les quatre phases du Double Diamant.
Source Design Council
Modèle 4D et 5D
La méthodologie 4D est très proche de la précédente. Elle divise un projet en processus avec 4 étapes distinctes : Découvrir, Concevoir, Développer et Déployer.
Modèle Deep Dive (Plongée profonde)
Le modèle “Deep Dive” est plus un outil qu’une méthodologie. Si l’on veut creuser un problème très profondément, celui-ci est très approprié. Le Deep Dive est une combinaison de brainstorming, de prototypage et de boucles de feedback combinées dans une approche que les managers peuvent utiliser avec des équipes pour aider à développer des solutions pour des tâches métier spécifiques. Dans un premier temps, nous comprenons le marché / le client / la technologie et les contraintes. Dans la deuxième étape, des personnes réelles dans des situations réelles en tant que témoins. Ensuite, des concepts inédits et des clients finaux sont envisagés. Les prototypes sont ensuite affinés et évalués. Enfin, nous appliquons un nouveau concept pour la commercialisation.
Modèle Donut
La méthodologie Donut est circulaire et itérative. On commence à partir de la conception, puis on circule jusqu’à résoudre le problème. Le cycle de conception itérative divise le processus de résolution de problèmes en quatre catégories :
- recherche de problèmes (observation et recherche)
- sélection de problèmes (recadrage et contextualisation)
- recherche de solutions (convergence et établissement des besoins)
- sélection de solutions (expérimentation et prototypage)
Modèle en spirale
Le modèle en spirale se concentre sur la réduction des risques ou des erreurs, mais aussi des alternatives peu attrayantes au début du processus de développement logiciel. Parce que le raffinement continu fait partie de chaque cycle de développement, il laisse place à une investigation systématique de l’espace de la solution.
Voir cet article très complet de Han Guo dans le site UX Matters pour mieux comprendre les apports de ce modèle : “When Change Is Constant : A Spiral UX Design Model”.
Méthode d’innovation FORTH
Méthode d’innovation FORTH
La méthode d’innovation FORTH a été développée par Gijs van Wulfen pour aider les entreprises à gérer de manière plus efficace et structurée la partie frontale de l’innovation.
Cette méthode est partie du constat que l’innovation était pour la plupart très difficile à maîtriser. Des études montrent que seul un quart de toutes les organisations sont efficaces pour aborder l’innovation. Voici les résistances les plus courantes :
- Notre état d’esprit nous limite à des projections à court terme.
- Notre processus d’innovation est non organisé, chaotique.
- Nous ne parvenons pas changer nos habitudes au sein de l’entreprise.
- Nous peinons à comprendre les attentes de nos clients.
- Il n’y a pas de soutien à l’innovation parmi nos collègues.
Le processus relie la créativité et la réalité des affaires en cinq étapes claires. Nous avons combiné les outils Design Thinking suivants dans ces étapes:
- A toute vapeur (Full Steam Ahead): Mind Map pour définir les opportunités d’innovation et les objectifs concrets pour l’affectation.
- Observez et apprenez: Safari photo, interview, recherche visuelle pour comprendre les besoins de l’utilisateur final et explorer les tendances. Moodboard pour visualiser les informations recueillies.
- Confrontation d’idées: Idées à jeter par écrit, confrontation pour la génération d’idées, vote visuel pour sélectionner des idées pour le développement de concept.
- Idées de test: Prototypage rapide du concept de service en tant que solution de bureau avec Lego Serious Play.
- Retrouvailles: matrice de Business Model pour finaliser le concept et développer une mini étude de cas.
Voir le site dédié : http://www.forth-innovation.com
Autres méthodes et outils
Vous trouverez de nombreux autres exemples de méthodes sur le site Design Thinking Methodology. En voici quelques uns :
- Circular Chaos
- Stuart Pugh
- Simon Herbert
- NPD (Booz et al.)
- NPD (Ulrich and Eppinger)
- NPD (Andreasen and Hein)
- Modèle en V
- Waterfall
Comment expliquer le succès du Design Thinking pour innover ?
La montée en puissance de la pensée design va de pair avec celle du Design d’expérience utilisateur (UX Design) et du Design centré sur l’humain (Human-Centered design) en général. Toutes ces approches s’insèrent dans un contexte spécifique. La place des services et de l’expérience supplante l’économie industrielle traditionnelle orientée “produits”. Les clients et consommateurs veulent des services et des offres personnalisées.
Quels sont les avantages de la pensée Design ?
De plus, avec les nouveaux usages numériques, les comportements évoluent très rapidement. Il devient difficile de trouver sa place sur un marché concurrentiel où toutes les entreprises visent l’innovation. La pensée design, de ce point de vue, présenterait notamment les avantages suivants :
- L’humain (utilisateur, collaborateur ou client) est au centre des préoccupations
- Les usages des produits peuvent ainsi être repensés pour toucher vraiment leur cible
- Les interactions de qualité dans l’équipe amènent de meilleures relations entre l’entreprise et le client
- Le fait d’impliquer tous les acteurs du projet valorise chacune des compétences et améliore la productivité dans l’entreprise
- L’aspect pluridisciplinaire évite aussi l’écueil de la conception « par un expert, pour un expert »
- Le recours rapide à des prototypes basse fidélité (ex. maquette papier-crayon) permet de réduire le coût financier de repérer rapidement les erreurs ou les impasses
- La prise en compte de la réalité du marché et les tests rendent les innovations pertinentes
Cette approche contribue à améliorer l’expérience de l’utilisateur (UX) et l’expérience client (CX), atout concurrentiel qui explique en partie son succès. Une méthode pour l’innovation suscite l’attention de toutes les organisations, car l’innovation n’est plus une option aujourd’hui.
L’état d’esprit (mindset) est l’une des raisons du succès selon Tom Kelley (IDEO)
La confiance en soi, facteur de créativité, selon David Kelley (IDEO)
Un exemple de succès : la startup Airbnb
Dans un tout autre registre, cette vidéo présente le fondateur de la société Airbnb et le rôle qu’a joué le DT dans le succès planétaire qu’on lui connaît.
Comment le Design thinking a-t-il transformé Airbnb, d’une start-up déficitaire, en un business de plusieurs milliards de dollars ?
Le Design Thinking est-il un mythe ? … Oui, mais un mythe utile !
Une voix discordante, et non des moindres a toutefois ébranlé cet enthousiasme autour de la pensée design. Donald Norman, “l’inventeur de l’UX” émet une réserve de taille : le Design Thinking ne serait qu’un mythe, mais un mythe utile !
Design Thinking : a useful myth (Premier article, version critique)
En 2010, dans un premier article iconoclaste intitulé « Design Thinking : a useful myth » Donald Normal porte en effet un jugement sévère sur la manière dont est présentée cette “pensée design”, souvent perçue comme une “pensée magique” réservée à quelques agences ou designers, détenteurs exclusifs de cette approche.
ça commence fort !
“Un mythe puissant est apparu sur la terre, un mythe qui imprègne les affaires, les universités et le gouvernement. C’est envahissant et persuasif. Mais même si c’est relativement inoffensif, c’est faux. Le mythe? Que les designer possèdent un processus de pensée mystique et créatif qui les place au-dessus de tous les autres dans leurs compétences à la pensée créative et révolutionnaire. Ce mythe est un non-sens, mais comme tous les mythes, il a un certain sens de la plausibilité, bien qu’il n’y ait aucune preuve. Pourquoi devrions-nous perpétuer une telle pensée absurde et erronée? Parce qu’il s’avère être un moyen très utile de convaincre les gens que les designers font plus que de rendre les choses belles. Ne laissez jamais les faits faire obstacle à l’utilité.”
(…)
“Le design thinking est une expression formelle pour une pensée créative démodée. Il n’est pas réservé aux designers. Les grands artistes, les grands ingénieurs, les grands scientifiques sortent tous des limites. Les grands designers ne sont pas différents. Alors, pourquoi perpétuer un tel mythe de la pensée design, si clairement faux ? Parce que c’est utile.
Pourquoi la communauté du design perpétue-t-elle ce mythe? Parce qu’il sert bien les bureaux d’études. Embauchez-nous, disent-ils, et nous allons vous apporter la “magie des entreprises de design”, en produisant des merveilles sur votre entreprise morte, rigide et improductive. Il est important de prétendre avoir une arme secrète et puissante.”
Mais quelques temps plus tard, Donald Norman s’est ravisé, publiant un autre article aux conclusions diamétralement opposées. Mais on peut soupçonner Donald Norman de conserver un regard critique sur la manière dont le DT peut être instrumentalisé.
“This is the first of two essays on “Design Thinking” that I published on Core77.com. In the first essay, I say it is a bad idea. In the second essay, I repent. It is a wonderful idea. Confused? Read the two essays.” Donald Norman
Rethinking Design Thinking (second article, version revue)
Nous vous recommandons vivement la lecture de ce second article, d’autant plus passionnant qu’il montre le revirement de Donald Norman sur le sujet !
Rethinking Design Thinking
“ En juin 2010, j’ai publié un essai sur Core77 intitulé Design Thinking: un mythe utile. Depuis que mon essai a été publié, je continue à rencontrer des gens qui vont directement aux solutions et qui ne remettent pas en question les hypothèses – des ingénieurs, des businessmans, et oui aussi, des designers (et des étudiants en design). Ces rencontres m’ont fait reconsidérer [mon premier article]. J’ai observé des étudiants en design qui agissaient sans réfléchir, faisant simplement leurs devoirs tels qu’ils étaient présentés. Pas de créativité, pas d’imagination, pas de questionnement. Ce n’est pas ce sur quoi porte le design. En conséquence, j’ai changé d’avis: le DT apporte vraiment quelque chose de différent. Hélas, il n’est pas adopté par tous les designers, mais là où il existe, il est puissant. Cependant, si nous appelons cela du design thinking, tous les designers ne devraient-ils pas l’utiliser ?”
Lire la suite
Vers la fin du Design Thinking ?
Certains sont allé plus loin dans la critique, déclarant la démarche dépassée et prophétisant la mort du DT.
Le design thinking est-il mort ?
Le design thinking est-il victime de son succès (buzzword) ?
La réussite de cette méthode en a fait un buzzword qui n’a pas manqué de susciter des critiques, parfois sévères, telles que celle que développe Natasha Jen dans cette vidéo très polémique (avec une bonne part de mauvaise foi, il faut le dire, mais aussi quelques formules bien senties).
En savoir plus sur Natasha Jen : “Design Thinking is Bullsh*t” (99U)
La réponse ne s’est pas fait attendre…
Yes, Design Thinking Is Bullshit…And We Should Promote It Anyway
Lire aussi Natasha Jen’s “Design Thinking is Bullshit” Argument (Rain Noe in Core77)
En France, en 2013, Sylvie Daumal semble emboîter le pas à cette vague de scepticisme, avec cet article au titre quelque peu provocateur :
Le design thinking, nouveau souffle ou simple courant d’air ?
Elle y interroge le décalage de la France dans la réception et la propagation de la pensée Design, devenant une mode dans l’hexagone au moment où elle subit une vive critique aux USA. Elle va jusqu’à cette question qui pourra sembler amère à certains : “Serions-nous victimes d’une mode déjà dépassée ? “. Mais pour conclure sans équivoque :
“ Dans le contexte français, la place du design reste problématique et sous-évaluée. C’est ce qui a motivé la création du collectif DesignCode, fondé en 2012 par les directeurs du design de grandes entreprises françaises, qui plaide pour une reconnaissance de son importance dans l’innovation. Nous sommes loin d’avoir intégré la logique créative comme facteur d’innovation et de compétitivité dans l’entreprise. Si le Design Thinking n’est pas une garantie absolue de réussite, sa démocratisation pourrait néanmoins favoriser une prise de conscience chez les dirigeants de l’apport stratégique de la créativité et du design dans l’entreprise. “ Sylvie Daumal
Un modèle dépassé, une “expérience ratée” ?
C’est Bruce Nussbaum, pourtant l’un de ses ardents défenseurs au début, qui jette le pavé dans la marre. Il présente la pensée Design comme une “expérience ratée” et propose un nouveau cadre conceptuel qu’il nomme “intelligence créative”.
“Le Design Thinking a donné à la profession et à la société dans son ensemble tous les avantages qu’elle avait à offrir et commence à se scléroser et même à causer du tort. À l’origine, le DT offrait au monde des grandes entreprises – défini par une culture de l’efficacité des processus – une toute nouvelle méthode qui promettait de créer de la créativité. En associant la créativité à un processus, les concepteurs ont pu développer leur engagement, leur impact et leurs ventes dans le monde de l’entreprise. Les entreprises étaient à l’aise et accueillantes pour le DT, car il s’agissait d’un processus.
Il y a eu beaucoup de succès, mais beaucoup trop d’échecs dans cette démarche. Pourquoi ? Les entreprises ont bien assimilé le processus de DT, le transformant en une méthodologie linéaire, fermée, littérale, qui a permis, au mieux, de l’innovation incrémentale. Appelez ça l’innovation N + 1.”
Bruce Nussbaum
Pour aller plus loin lire l’intégralité de l’article publié sur Fastcodesign : “Design Thinking Is A Failed Experiment. So What’s Next?”. Voir aussi cet excellent article de Jean-Pierre Lea qui s’en fait l’écho, “Vers la mort du Design Thinking ?”, publié dans les Cahiers de l’Innovation.
L’Intelligence créative comme alternative ?
Dans cette Keynote, Bruce Nussbaum affirme que nous vivons dans un monde de VUCA – Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity (Volatilité, Incertitude, Complexité et Ambiguïté, VICA en français). La question-clé à laquelle nous sommes tous confrontés est la suivante : Comment pouvons-nous trouver des opportunités dans un monde de VUCA et les transformer en produits, services et engagements avec des consommateurs qui génèrent de la valeur pour nos entreprises et pour nous-mêmes? L’intelligence créative fournit une méthodologie puissante pour augmenter nos capacités créatives individuelles et organisationnelles. Les cinq principales méthodes de CQ-Creative Intelligence sont Knowledge Mining (savoir ce qui est significatif pour les gens), Framing (comprendre l’histoire narrative et l’engagement avec les gens), Playing (expérimenter avec des résultats inconnus), Making (exploiter les dernières technologies) et Scalling – Mise à l’échelle (apport de nouveaux produits et services sur le marché). L’intelligence créative ressemble beaucoup au sport – nous pouvons tous nous entraîner et augmenter nos capacités créatives. Nous pouvons faire émerger de nouveaux produits et services précieux et créer de toutes nouvelles entreprises. Nous pouvons apprendre à exploiter VUCA, ne pas le craindre.
Le Design thinking, mal compris ou mal intégré par les entreprises ?
La “créativité”, LE véritable livrable
Bruce Nussbaum poursuit ainsi :
“Les bureaux d’études qui ont fait la promotion de DT espéraient en effet qu’une astuce de processus produirait des changements culturels et organisationnels significatifs. Dès le début, le processus de DT a été un échafaudage pour le véritable livrable : la créativité. Mais pour faire appel à la culture d’entreprise du processus, on a supprimé le désordre, le conflit, l’échec, les émotions et les itérations qui font partie intégrante du processus créatif. Dans quelques entreprises, les PDG et les directeurs ont accepté ce gâchis dans le processus, et l’innovation réelle a eu lieu. Dans la plupart des autres, ce n’était pas le cas. Comme le reconnaissent maintenant les praticiens du DT dans les cabinets de conseil, le taux de réussite du processus était faible, très faible.”
(…)
“Mais c’était la créativité que le Design Thinking devait à l’origine fournir et c’est vers la créativité que je me tourne maintenant directement et délibérément. La créativité est un concept ancien, bien plus ancien que le «design». Mais c’est un concept inclusif. Dans mon expérience, quand vous dites le mot «design» aux gens autour d’une table, ils ont tendance à sourire poliment et à penser «fashion». Dites «design thinking», et ils cessent de sourire et tendent à s’éloigner de vous. Mais dites «créativité» et leur intérêt s’illumine et les gens se rapprochent de vous.”
Bruce Nussbaum (“Design Thinking Is A Failed Experiment. So What’s Next?” in Fastcodesign)
Un problème de mise en oeuvre
Selon Bruce Nussbaum, les précurseurs qui ont introduit le DT en entreprise espéraient que la mise en œuvre de ce nouveau process engagerait de lui-même de grands changements culturels et organisationnels. Il ne faut pas oublier que, dès le départ, la pensée design avait pour principal objectif la créativité. Mais c’est dans la volonté de la concilier avec la « culture procédurale » des entreprises que la méthode a pu être été dépouillée du désordre, du conflit, des échecs, des émotions et des boucles de rétroaction qui sont constitutifs de la créativité. Le monde de l’entreprise et sa logique “linéaire”, son obsession de l’efficacité (à court terme), aurait “perverti” le projet initial qui n’a pas toujours eu les moyens de se déployer comme il aurait dû.
Repenser le rôle des designers
Bruce Nussbaum reconnaît toutefois au Design thinking l’immense mérite d’avoir permis de repenser le rôle des designers dans la société. Initialement cantonnés aux seuls objets et à leur esthétique, puis au design de services, les designers occupent désormais une place essentielle en cela qu’ils intègrent l’humain dans leurs approches et prennent en considération les problèmes sociaux, économiques et environnementaux.
Au fond, l’analyse critique que porte Bruce Nussbaum sur la pensée Design revient à interroger les conditions de son application, non ses fondements et ses objectifs.
Make the design great again !
Un buzzword ?
Au delà de l’effet “buzzword” qui a suscité le rejet d’une méthode parfois réduite à l’utiliser de post-it, émerge une interrogation profonde sur le rôle du designer.
C’est en partie la raison d’être des réflexions actuelles sur l’éthique du design.
A quoi sert le Design ?
L’enjeu n’est donc pas tant de “défendre” telle ou telle méthode, mais de s’interroger sur la vocation profonde du Design.
Tim brown a très vite compris l’importance de dépasser le débat consistant à enfermer le designer dans un rôle de concepteur de “beaux objets” ou même de “services faciles à utiliser”.
Il insiste sur le caractère impératif de recentrer la pensée design sur l’humain, et non sur l’utilisateur.
Voici sa définition :
« La pensée design est une approche de l’innovation centrée sur l’humain qui s’inspire de la boîte à outils du designer pour intégrer les besoins des personnes, les possibilités de la technologie et les exigences de réussite commerciale. » Tim Brown, IDEO
Dans cette logique, Tim Brown revient sur le rôle du designer. Il s’appuie pour cela sur sa propre expérience en rappelant l’enjeu d’un design centré sur l’humain, et non une méthode de plus pour designer en mal de nouveauté. Selon lui, la profession des designers est souvent tentée par la création d’objets chics et à la mode – alors même que des questions pressantes comme l’accès à l’eau potable montrent qu’elle a un rôle plus important à jouer. Il appelle à un mouvement vers une “pensée design locale, collaborative et participative”.
Le sens de l’innovation
Cette orientation est clairement visible dans la tendance émergente de nombreuses organisations interrogeant le sens de l’innovation qu’elles peuvent apporter, aussi bien à leurs clients qu’en interne, à leurs collaborateurs. C’est tout l’enjeu du design des applications métier par exemple. Il ne s’agit plus tant de produire des objets plus agréables à utiliser, ni même des services mieux conçus, plus efficaces, mais d’apporter ou faire surgir le sens qui en fait de “belles expériences”. Tim Brown le rappelle dans cette vidéo : selon lui, l’innovation n’est pas seulement portée par une vision “centrée utilisateur”, elle est résolument “centrée sur l’humain”.
C’est ce qu’il expose dans ce TEDX plutôt décapant que nous vous invitons vivement à regarder jusqu’au bout.
Quels sont les obstacles au développement du Design Thinking en France ?
Dans les pays anglo-saxons, cette approche a très vite connu un réel succès. Des entreprises de premier plan en ont dès le début compris l’intérêt et l’ont adoptée, telles Microsoft, Dropbox, airbnb, Google… mais aussi de nombreuses autres organisations de toute taille. La méthode du Design Thinking permet de trouver des solutions innovantes dans des secteurs variés : l’éducation, la recherche scientifique, la santé, les transports, le développement durable…
Pourtant, en France, cette approche s’avère encore difficile à appliquer dans les entreprises, et ce pour plusieurs raisons :
- La démarche axée sur l’erreur s’oppose au modèle traditionnel
- L’organisation des métiers se fait encore souvent en silos
- Le management va dans le sens d’objectifs à atteindre sans prise de risque
- Le modèle d’innovation reste plutôt linéaire et séquentiel
- Le design reste souvent assimilé à un point de vue artistique, esthétique : Design et business ne s’accordent donc pas
Innover ou disparaître
Néanmoins, poussées par la nécessité d’innover pour survivre, de plus en plus d’entreprises commencent à sérieusement s’y intéresser.
Tiphaine Gamba, dans un mémoire de Mastère spécialisé « Innovation by Design » et intitulé Innover en France avec le Design Thinking (2016) reprend certains de ces obstacles dans cette présentation :
Quelles compétences pour devenir design thinker ?
“Everyone is a designer” – Tim Brown, IDEO
À en croire Tim Brown, il suffit de posséder différentes caractéristiques et d’avoir un regard particulier sur le monde. Ainsi, un Design Thinker est :
- Empathique : une capacité à avoir le bon “état d’esprit” pour ressentir et éprouver ce que ressentent les utilisateurs ou usagers en situation, s’immerger dans l’expérience métier par exemple et échanger ouvertement
- « Integrative thinking » : savoir prendre une décision ou trouver une solution en tenant compte de tous les aspects d’un problème
- Prêt à expérimenter: disposé à explorer toutes sortes de directions
- Capable de travailler en équipe multidisciplinaire : en dehors des silos existants
La pensée design nous invite à « sortir de la boîte » (« think out of the box ») pour développer un regard différent et créatif sur ce qui nous entoure. C’est d’une certaine manière l’essence de la pensée Design au sens large.
L’audace et l’ingéniosité doivent être valorisées. Ainsi, la phase d’idéation laisse une grande liberté. Chacun est encouragé à sortir de sa zone de confort et à se surpasser. Cependant, la capacité à observer et à analyser est aussi essentielle.
Mais alors, peut-on être design thinker sans être designer ?
En réalité, le design thinker est aussi un UX designer. Il ne suffit pas de penser design et d’être créatif. Il importe aussi de savoir représenter visuellement, prototyper, concevoir. Certes, chacun est impliqué dans l’aspect participatif du design thinking, quel que soit son rôle au sein de l’agence ou de l’entreprise. Mais c’est in fine au designer de faire le prototypage, d’enclencher le “design doing”. L’esprit design permet en tout cas d’éveiller les entreprises à la culture de l’innovation.
Conclusion
Dans sa genèse, le Design Thinking est une approche anglo-saxonne de l’innovation. Le succès de la pensée design est véritablement né avec la révolution digitale et la nécessité d’innover différemment. Mais le Design Thinking est un terme interprété différemment selon les contextes. Pire, il est en voie de devenir un « buzzword », ce qui n’a pas manqué d’alerter les acteurs les plus exigeants tels que Don Norman et Tim Brown. Esprit design ou Pensée Design, le Design Thinking est une méthode d’intelligence collective centrée sur l’utilisateur (ses usages, ses attentes, ses besoins) ou sur l’humain (Tim Brown) . C’est une manière de penser en utilisant la sensibilité et les méthodes des designers. Cette démarche met ainsi l’accent sur l’empathie, la vision holistique d’une situation (réflexion et créativité), et la pensée divergente. Cette approche permet d’innover dans la conception de services ou de produits, mais aussi dans les stratégies d’entreprises, l’organisation du travail, voire même la transformation de l’individu et de la société, par un processus participatif de résolution des problèmes.
Pour aller plus loin
“This is Service Design Thinking”
“This is Service Design Thinking” est un livre de référence et une excellente introduction à la pensée design. Il décrit une approche contemporaine de l’innovation de service. Il explique son approche, son contexte, son processus, ses méthodes et ses outils – et relie la théorie aux études de cas contemporaines. 23 auteurs internationaux ont participé à ce manuel interdisciplinaire.
Voir la vidéo de présentation qui en donne un aperçu très synthétique :
Si vous cherchez une vue très complète sur les principales “méthodologies”, “approches” , “process” ou “outils” de la pensée design, allez jeter un oeil sur le site Design Thinking Methodology qui les regroupe en une page.
“L’esprit Design”
L’esprit Design de Tim Brown (PEARSON, 2014)
Tim Brown raconte comment son entreprise, IDEO, a été conduite sous l’impulsion de ses clients à sortir de ses champs habituels de réflexion pour repenser plus globalement leurs stratégies de développement.
Tim Brown aborde les changements indispensables dans les organisations et entreprises actuelles. La recherche d’innovation ne peut plus se limiter aux produits. Elle porte aussi sur les procédures, les services, les échanges, les loisirs, les moyens de communication, les relations de travail etc. Les designers ont développé un savoir-faire dans la recherche de solutions, la capacité à transformer les contraintes en opportunités, l’observation et la compréhension des besoins des individus. Ils se sont forgé une méthode de pensée et une culture de l’innovation qui dépassent les questions qu’ils résolvent en tant que designers : le design thinking
“Change By Design”
Change By Design de Tim Brown (2009)
Tim Brown, PDG d’IDEO, la célèbre firme d’innovation et de design, montre comment les techniques et les stratégies de design appartiennent à tous les niveaux d’activité. “Change by Design” n’est pas un livre de designers pour les designers. Il s’agit d’un livre destiné aux leaders créatifs qui cherchent à insuffler la pensée design à tous les niveaux d’une organisation, d’un produit ou d’un service afin de créer de nouvelles alternatives pour les entreprises et la société.
“Méthode Design Thinking IBM”
Dans ce guide à imprimer et réservé aux designers avancés, IBM définit le design comme “l’intention derrière un résultat”.
Il s’agit de penser à la vitesse et à l’échelle des besoins des organisations et entreprises d’aujourd’hui. Cela passe pas la création d’un cadre pour les équipes et l’action. Ces équipes produisent ainsi des résultats qui font progresser l’état de l’art et améliorent concrètement la vie des gens.
“Service Innovation Handbook”
Service Innovation Handbook de Lucy Kimbell
Guide pratique à l’usage des designers sur le design thinking, le service design et l’experience design.
Hasard des titres, Lucy Kimbell a produit les deux articles “Rethinking Design Thinking” au même moment que Donald Norman, sans aucune corrélation entre les deux !
Kimbell, Lucy (2011) Rethinking Design Thinking: Part 1
Kimbell, Lucy (2012) Rethinking Design Thinking: Part 2
“DesignThinking”
Design Thinking: Integrating Innovation, Customer Experience, and Brand Value (Paperback, 2009) de Thomas Lockwood,
Le DT confirme que le design, en tant que processus et en tant que produit, a plus de chances d’ajouter de la valeur à la triple bottom line (ligne de résultat) que toute autre fonction métier. Cet ouvrage explore les points de vue, les techniques, les méthodes et les études de cas pratiques des leaders d’opinion internationaux. Il couvre différentes méthodes de pensée du design, le rôle de la pensée design dans le design de service ; dans la “construction” d’une marque; et la place du design thinking dans la création d’expériences client. Le livre compile les essais de Thomas Lockwood avec 24 autres auteurs.
“Le Design Thinking par la pratique”
Le Design Thinking par la pratique (Éditions Eyrolles) de Véronique Hillen et Florence Mathieu
De la rencontre avec l’utilisateur à la commercialisation d’un produit innovant pour les seniors
Cet ouvrage, coécrit par Véronique Hillen, fondatrice de la d.school Paris, et Florence Mathieu, créatrice d’Aïna, présente un exemple concret d’application des principes du design thinking, celui de la création d’un meuble de salle de bains destiné aux seniors. Il détaille la méthodologie suivie en trois phases clés : Inspiration, Idéation et Implémentation. Elle a permis le lancement en un temps exceptionnellement court d’un produit véritablement innovant, et l’inflexion des pratiques au sein de l’organisation à l’origine du projet.
“101 repères pour innover grâce au Design Thinking”
Voir le livre : “101 repères pour innover grâce au Design Thinking” sur le site de Véronique Hillen, fondatrice et doyenne de Paris Est d.school
“Le Futur du design thinking”
Voir aussi cette conférence de Véronique Hillen, toujours passionnée lorsqu’elle aborde la “rencontre” avec le DT :
Lire aussi cet article, Design an Business : The Future of Design Thinking
Articles sur le Design Thinking
Plus ancien, relire l’article fondateur de Richard Buchanan « Wicked Problems in Design Thinking » (1992).
Essai basé sur un article présenté au “Recherches sur le Design : Incitations, Implications, Interactions”, le premier colloque universitaire français sur la recherche en design organisé en octobre 1990 à l’Université de Technologie de Compiègne.
Voir aussi cet article qui revient sur la thèse de Richard Buchanan : Facing Complexity: Wicked Design Problems
“Dans son article phare « Wicked Problems in Design Thinking », Richard Buchanan a souligné que les designers conçoivent et planifient souvent « ce qui n’existe pas encore, et cela dans le contexte de l’indétermination des problèmes épineux » (Buchanan, 1995, p.17 )”
Documentaire sur le Design Thinking
Documentaire (1h15) très complet : DesignAndThinking : Voici le trailer mais vous pouvez le visualiser en entier ici (payant).
Lire aussi :
- Le Design Sprint : pour stimuler l’innovation au sein de votre entreprise
- Qu’est-ce que l’UX (User eXperience) ?
- Qu’est-ce que le Design de service ?
- Qu’est-ce que le Design émotionnel ?
- Qu’est-ce qu’un biais cognitif ?
- Qu’est-ce que les sciences cognitives ?
- Qu’est-ce que la psychologie cognitive ?
- Qu’est-ce que l’UX Research, User Research ou recherche utilisateur ?
- Co-conception, pour une conception UX participative
- Design Thinking, Lean Startup, Lean UX et méthode Agile : quelles sont les différences ?
Voir aussi :
- Notre formation au Design Thinking en 2 jours.
Deux jours pour appliquer les fondamentaux de la méthode de Design Thinking ! - Le Design thinking pour une innovation viable
Passionnant !
Merci ! Je ne savais que cela portait un nom… Il me semble que c’est la base du marketing : partir de l’humain ! Un rappel sans doute utile à certains :)
c’est un extraordinaire article! merci pour ce beau travail. :)
Bonjour,
Je n’ai pas le compliment facile, mais je dois vous féliciter pour ce topo documenté, précis, complet et clair… Bravo !
Super intéressant