Illustration Nick Kombari (Dribbble)
L’Eye-tracking, oculométrie en français, est un dispositif capable de suivre les mouvements oculaires sur l’écran. L’eye-tracking permet de voir ce que regardent les utilisateurs. Des micro-caméras enregistrent les mouvements visuels de la pupille de l’œil. Elles reconnaissent les déplacements du regard (les saccades) et la focalisation sur certains éléments (fixation). Cette dernière va nous intéresser car elle signale, en général, un traitement de l’information par l’utilisateur.
Pourquoi utiliser l’eye-tracking ?
Une étude d’eye-tracking sert à vérifier que l’interface est correctement perçue et parcourue par l’utilisateur. Elle va identifier certains problèmes d’utilisabilité, en particulier ceux liés à la visibilité des informations.
Cette technique permet également d’obtenir différentes informations sur l’expérience utilisateur :
- Repérer le degré d’attention de l’utilisateur par rapport aux différentes informations affichées à l’écran.
- Savoir, en fonction du diamètre de la pupille, s’il recherche une information précise.
- Comparer la manière dont différents groupes d’utilisateurs analysent l’interface.
- Découvrir si les utilisateurs sont distraits par certains éléments de la page.
- Comparer l’attitude de l’utilisateur face à des conceptions différentes de l’interface dans le cadre d’un test comparatif.
L’eye-tracking permet de recueillir des éléments objectifs sur le parcours visuel de l’interface. Cette technique aide à repérer les informations utiles ou inutiles, et permet de mieux les agencer à l’écran.
Les limites de l’eye-tracking
Cette approche a toutefois ses limites. Tout d’abord, le suivi oculaire coûte relativement cher, indépendamment du matériel, car, pour obtenir des données fiables, il nécessite un panel plus important de participants qu’un test utilisateur classique. En effet, une étude eye-tracking demande une quarantaine de participants pour obtenir une carte de chaleur fiable, alors que huit personnes suffisent pour un test utilisateur. Ensuite, les visions périphériques et péri-fovéale ne sont pas prises en compte dans le suivi oculaire. On ne sait donc pas exactement où l’utilisateur regarde durant la totalité du test. De plus, certains paramètres peuvent fausser le test : porter du mascara, se rapprocher de l’écran ou s’en éloigner, porter ses mains à son visage, etc.
Surtout, l’eye-tracking ne permet pas de savoir pourquoi l’utilisateur porte son regard à tel endroit ou à tel autre. La fixation peut avoir plusieurs causes. L’utilisateur fixe un contenu textuel qu’il trouve passionnant ou, au contraire, s’y arrête parce qu’il ne le comprend pas. Mais il ne nous est pas possible d’interroger le participant pendant l’étude car il ne doit pas être interrompu. Les interactions peuvent détourner son regard, son attention et interférer avec les tâches.
Cette technique est donc difficilement utilisable seule. Pour que les résultats soient pertinents, elle doit être complétée par un test d’utilisabilité.
Le matériel utilisé pour l’eye-tracking
Les systèmes d’oculométrie ont beaucoup évolué ces dernières années. Les dispositifs actuels sont légers et peu contraignants pour l’utilisateur qui oublie rapidement que les mouvements de son regard sont enregistrés. Sur le marché, il existe deux types d’eye-tracker dont l’utilisation dépend du contexte d’expérimentation. Des dispositifs placés sous l’écran de l’ordinateur vont permettre d’évaluer une interface fixe, tandis que des lunettes (eye-tracking glasses) servent à des évaluations plus globales, y compris en extérieur. Si l’utilisateur est susceptible de se déplacer ou de manipuler d’autres dispositifs sur son poste de travail, il vaut mieux opter pour les lunettes. En effet, avec un eye-tracker fixe, la distance entre l’œil et l’écran doit rester stable. Cela implique un certain immobilisme de la part du participant.
Comment se déroule la préparation du test ?
Le panel doit être représentatif des utilisateurs visés par l’application. On veillera toutefois à ce que les participants n’aient pas de difficultés visuelles, qu’ils ne portent pas de lunettes ou de lentilles car cela rend la calibration très difficile.
Tout comme pour un test utilisateur, l’évaluation oculométrique est menée à partir d’un scénario commun à tous les participants afin de pouvoir comparer les résultats, par exemple : acheter un objet précis (pour un site e-commerce), compléter un formulaire administratif, etc. Une fois la consigne donnée, les participants doivent se comporter face à l’interface comme ils le feraient dans leur environnement quotidien.
Au début du test, une phase d’étalonnage de l’appareil est à prévoir. Elle dure 10 à 15 minutes selon les modèles.
La réalisation du test d’oculométrie
Déroulement du test d’oculométrie (eye-tracking)
Au cours de la session, l’oculomètre (eye-tracker) enregistre en temps réel les mouvements du regard de l’utilisateur ainsi que les moments où son attention se fixe sur un élément. En général, durant un test utilisateur, on utilise le protocole de réflexion à voix haute (Think Aloud) qui consiste à demander à l’utilisateur de verbaliser ses pensées. Dans un contexte d’eye-tracking, cette pratique est à proscrire. La description verbale des actions altère les déplacements du regard. Le facilitateur doit donc rester en retrait et discret pour ne pas perturber le test. Idéalement, il est préférable que le participant reste seul dans la pièce pendant la séance.
Exemple d’utilisation de l’eye-tracking dans la cadre de la refonte UX de la page d’accueil du site Le Parisien réalisée par notre équipe.
Entretien post test
Le test est souvent complété par un entretien rétrospectif. Cette méthode consiste à demander à l’utilisateur d’expliquer ses choix après la séance. L’animateur du test lui montre les résultats enregistrés et lui pose des questions. Cet échange complémentaire apporte un éclairage intéressant sur la séance. Attention toutefois car certains participants auront tendance à post-rationaliser leurs décisions en les commentant.
L’analyse des données
Les données issues d’une séance de eye-tracking sont présentées soit sous la forme d’un parcours oculaire (gaze plot) :
soit avec une carte de chaleur (heatmap) :
Dans le premier cas, l’accent est mis sur la trajectoire des yeux, l’ordre dans lequel l’utilisateur regarde les éléments. Dans le second, les résultats montrent quelles sont les zones les plus observées avec des points colorés plus ou moins larges de couleur variable. Ce type d’analyse nécessite un nombre plus important de participants (au moins 39, d’après Nielsen et Pernice, 2009).
Le parcours oculaire va permettre de vérifier que l’organisation des informations sur l’interface suit la logique de l’utilisateur, que les informations sont présentées dans le bon ordre. Il montre les hésitations dans le parcours et permet d’identifier les optimisations qui vont rendre la lecture plus fluide.
Les cartes de chaleur ou heat map
Les cartes de chaleur présentent de manière objective les zones qui ne sont pas vues par l’utilisateur. Autant le eye-tracking ne permet pas de savoir si une zone qui est vue est comprise par l’utilisateur, autant il montre de manière évidente les zones que l’utilisateur ne voit pas. Pour optimiser l’interface, la question se pose alors de savoir si ces zones présentent des informations utiles, auquel cas, il faut mieux les mettre en évidence.
Conclusion
L’eye-tracking permet d’analyser les besoins des utilisateurs par un procédé technique visant à suivre le parcours de l’œil. Cette méthode est employée en complément des entretiens utilisateurs, interviews, observations ou questionnaires en ligne.
Lire aussi :
- Le eye tracking face aux méthodes ergonomiques : Ce que le regard nous dit (2/3)
- L’eye-tracking face aux méthodes ergonomiques : Ce que le regard ne dit pas (3/3)
Lire aussi :
Public concerné : Consultants MOE, MOA, chefs de projet, designer UI, web designers, product owner, chef de projet digital.
Durée : 1 jour(s)
Prix : 590 €
Prochaines dates : 6 décembre 2024