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Dans les techniques qualitatives de recherche UX, le Shadowing occupe une place particulière. Très performante, cette technique d’observation permet d’éviter les biais par rapport aux méthode d’entretien aux tests utilisateurs, elle est toutefois à utiliser avec précaution quant à l’utilisation des résultats obtenus.
Attention ! Le mot/concept « Shadowing » est utilisé dans d’autres domaines : en apprentissage professionnel (RH) et en dramaturge (cinéma). C’est pour cela qu’il vaut mieux lui adjoindre un « UX », nous parlerons donc ici de « Shadowing UX ».
Le Shadowing UX : observer ce qu’ils regardent !
Dans le cadre d’un Shadowing, les UX Researchers observent en situation réelle les comportements d’un utilisateur avec une interface numérique pendant une période déterminée. Durant cette période, le chercheur n’interfère pas avec le participant afin d’éviter d’altérer son comportement naturel.
Shadowing en recherche UX, définition
On peut donc donner comme définition :
En UX, le Shadowing est une méthode qualitative d’observation comportementale qui permet d’observer les utilisateurs dans leur environnement naturel, à une échelle réduite.
Le Shadowing UX, une technique de recherche qualitative
Ce type d’observation est issu d’une méthode d’apprentissage classique, remise au goût du jour par les RH dans laquelle le stagiaire suit « comme son ombre » un professionnel pour apprendre son métier.
L’idée d’observer quelqu’un pour voir ce qu’il fait est simple : le chercheur UX accompagne l’utilisateur et observe comment il utilise l’interface dans son environnement quotidien.
Mais comme toute technique, le Shadowing UX doit être utilisé dans un cadre rigoureux, pour un besoin et dans un but tout aussi précis. Car il ne s’agit plus ici de copier un comportement, mais de le comprendre pour prévoir des évolutions.
Le Shadowing UX est une méthode de recherche comportementale
« Demander aux utilisateurs d’adopter de nouveaux comportements ou même de modifier des comportements existants est très, très difficile », explique Khoi Vin.
Le Shadowing UX a donc pour but de comprendre des actions réelles afin d’adapter l’UX Design à des comportements existants.
Le temps d’observation dépend de l’importance de l’interface, du nombre d’utilisateurs testés et des interactions à observer, il peut aller de 30 minutes à quelques semaines ou même plusieurs mois.
Principe indérogeable du Shadowing UX
L’UX Researcher ne doit jamais interférer avec le sujet de la recherche (le participant), car cette interférence pourrait modifier la façon dont il se comporte avec l’interface numérique à l’instant T d’une circonstance. Le chercheur UX agit uniquement en tant qu’observateur.
Le Shadowing UX est donc très différent des méthodes qualitatives basées sur des ateliers et des entretiens. Il s’apparente plus aux enquêtes terrain ou ethnographique.
3 types de Shadowing UX
Les 3 modes d’observation employés par le Shadowing UX sont :
- Le mode naturel (sans aucune interférence). L’UX Researcher observe le participant pendant une période déterminée sans aucune demande ni aucune remarque.
- Le mode contrôlé. Le chercheur UX conçoit une tâche et l’observe pendant son exécution ;
- Le mode participatif. Le chercheur effectue lui-même l’activité observée afin d’obtenir un point de vue de première main.
Le Shadowing UX en 3 étapes
Comme dans toute recherche UX : préparation, exécution et analyses forment l’inséparable trio.
Étape 1 — Préparation
- Parcourez l’interface vous-même. Il vaut mieux découvrir et connaître le produit avant l’étude.
- Rédigez précisément vos objectifs et les hypothèses à valider ou à invalider. Cette étape vous aidera à collecter des données plus spécifiques au cours du processus et à structurer ce que vous trouverez. En fin de compte, la synthèse et l’analyse s’en trouveront grandement facilitées.
- Démarrez par une petite présentation, un entretien informel avec vos participants pour les mettre à l’aise, qu’ils comprennent la raison pour laquelle vous les suivez et les observez et pour les avertir qu’ils doivent faire comme si vous n’étiez pas là.
Étape 2 : Conduire l’expérience
La réalisation de l’expérience demande d’être prêt matériellement, psychologiquement et physiquement.
- Vous devez être sur le qui-vive pendant toute la durée de l’observation et noter tout ce que vous voyez.
- Choisissez vos outils : papiers et crayon, caméra, caméra et capture d’écrans… (Attention au volume qui peut devenir impossible à utiliser).
- Définir le temps d’observation. Que cette durée s’étende sur une journée, une semaine ou un mois, votre concentration sera limitée à 30 ou 40’. Ne dépassez pas cette durée de session.
- Notez toutes les questions que vous vous posez et que vous poserez à vos participants.
Étape 3 : Analyse
C’est le moment de compulser ! Commencez par réduire si le volume est trop important. Il vous faut rédiger un document clair, précis qui répond aux buts de la recherche.
Petit guide des questions à vous poser pour analyser vos données :
- Quels sont les comportements les plus importants enregistrés ?
- Qu’est-ce qui vous surprend ?
- Que font réellement les utilisateurs ? (Contrastes et oppositions avec ce que vous attendiez.)
- Qu’est-ce qui est difficile à utiliser ou à gérer pour les utilisateurs participants ?
- L’utilisateur a-t-il interagit comme il était censé le faire ?
- Leurs comportements correspondent-ils à ce qu’ils ont dit avant ou après la session ?
Shadowing en UX : avantages, inconvénients et limites
Comme pour toute technique, il y a des avantages et des inconvénients, mais pour le Shadowing UX, il est certainement préférable d’en connaître les limites pour ouvrir la recherche sur d’autres moyens.
Schéma des principes communs à toute méthode de recherche UX — source netsolutions
Avantages du Shadowing dans la recherche UX
- Pureté des données collectées. Le shadowing est une méthode de recherche qui ne produit aucun biais.
- Collecte de données directes et en temps réel, donc obtention d’informations riches et significatives qui n’auraient pas pu être découvertes autrement.
- Connaissance comportementale des utilisateurs de premier plan.
- Une recherche centrée utilisateur avec une dimension empathique forte.
- On peut préciser que ce type de recherche est un outil pratique de validation du parcours client.
Inconvénients et limites du Shadowing dans la recherche UX
- Temps de travail long et impliquant beaucoup d’utilisateurs et de chercheurs (un ou plusieurs observateurs sont requis pour observer chaque utilisateur).
- Type de recherche relativement chère et difficile à effectuer à grande échelle, donc une recherche non productive de statistiques.
- Analyse complexe. Chaque utilisateur peut avoir un moyen différent d’effectuer une même action. Donc l’organisation des données peut s’avérer plus complexe que dans d’autres méthodes.
- Pas d’opinions, pas d’avis de la part des utilisateurs. Le Shadowing UX sert à observer, donc à interpréter.
- Les résultats ne peuvent pas être considérés comme une représentation de l’ensemble des utilisateurs. Ce n’est donc pas une méthode de validation.
- Les résultats ne peuvent servir que de base pour des hypothèses de recherche et difficilement à des directives généralistes et importantes. L’analyse des données d’un Shadowing UX sert à ouvrir des pistes pour suggérer d’autres recherches quantitatives ou qualitatives supplémentaires.
Une approche originale qui classe les méthodes de recherche UX entre l’implication demandée aux utilisateurs et la demande de ressources pour la recherche — source pragmaticist
Une approche originale qui classe les méthodes de recherche UX entre l’implication demandée aux utilisateurs et la demande de ressources pour la recherche — source pragmaticist
En conclusion, le Shadowing UX est la méthode à utiliser lorsque vous souhaitez observer quelques utilisateurs pour documenter une réflexion ou pour poser les bases d’une recherche UX de grande ampleur. Car cette méthode ne produit aucun biais dans les résultats de recherche. C’est donc la bonne méthode pour vérifier ou contredire des hypothèses.
Bibliographie
Notre guide de référence : UX Design et ergonomie des interfaces de Jean-François Nogier — 7e édition, Dunod
Pour garantir le succès d’une application, celle-ci doit non seulement être utile, mais également facile à utiliser. C’est la raison pour laquelle l’UX Design est devenu une étape incontournable dans la conception des produits numériques.
Cet ouvrage de référence s’adresse à tous les professionnels impliqués dans la conception et le développement d’applications. Depuis sa première édition en 2001, il a été lu, relu, exploité et utilisé par de très nombreux chefs de projet, développeurs et concepteurs d’interface. Conçu de manière pragmatique, il présente une méthode claire et efficace pour « penser UX Design » et vous aidez à trouver des solutions pour vos projets.
À travers de nombreux exemples, vous y découvrirez des réponses aux questions que vous vous posez au fur et à mesure de la réalisation de vos applications, depuis le ciblage des utilisateurs, jusqu’aux choix graphiques, en passant par la conception du système de navigation et des éléments d’interaction.
Cette 7e édition apporte une actualisation en profondeur du chapitre sur les méthodes de conception des interfaces (chapitre 7).
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