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Ergonomie à coût réduit : comment faire pour s’en sortir ?

01/09/2008
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Moins l’organisation dans laquelle vous travaillez à un niveau de maturité d’ergonomie élevée et plus vous devrez faire avec ce qu’on vous donne (la marge de négociation étant extrêmement réduite). Dans un monde parfait, la qualité ne serait pas réduite par une réduction des coûts… donc la qualité de l’ergonomie sera réduite.

Comment faire pour s’en sortir ?

Il faut tout de suite vous faire une raison : Vous ne pourrez pas dérouler une démarche idéale ! Pour résister à la pression imposée par un rythme de spécification / production soutenu, par exemple dans le cadre d’un développement itératif, il faut réaliser votre intervention sur deux fronts : Conception et Analyse.

Conception minimaliste

  • Être rapide et efficace
  • Apporter votre vision d’expert
  • Imaginer des concepts pérennes
  • S’assurer un bon niveau d’adhésion

Est-ce encore de l’ergonomie ?

C’est une question que vous pourriez vous poser, surtout si vous avez du mal à accéder à une description : de l’utilisateur (ex. : Personas), des besoins (ex. : Cas d’utilisation), de la stratégie de l’entreprise (ex. : Définition et Ciblage projet) ou des informations à gérer (ex. : Architecture de l’information).

Dîtes-vous que oui, c’est encore de l’ergonomie ! Tout simplement parce que vous êtes là, avec vos savoirs, vos savoir-faire et vos savoir-être. Si c’est vous qui vous en occupez dans le temps imparti, l’utilisabilité finale sera toujours meilleure que si c’est un autre qui s’y colle.

Entre produire et échanger, mon cœur balance

Trouvez l’équilibre entre la production en autonomie et l’échange/partage est un exercice difficile.

Produire apporte la matière pour discuter puisque vous matérialisez votre analyse et vos idées. Votre livrable de prédilection : La maquette fil de fer. Pour vous, il semble difficile de ne pas produire d’autres livrables : Une maquette de zone pour la position et l’importance des concepts + un petit guide de conception regroupant vos décisions et raisons. Si vous en avez l’opportunité, consolidez ces livrables avec des échanges informels avec développeurs, graphistes, designer et ergonomes . Ils confirmeront la faisabilité de vos propositions.

Échanger entre deux versions de votre production. Il faut éviter de produire trop longtemps sans communiquer, ça donne un effet “boite noire” mal perçu par le client et les équipes projets. Préférez un fonctionnement en itérations courtes pour obtenir du retour. Vous aurez ainsi connaissance des remarques, des réserves et des résistances. Et comme vous avez peu de temps, ces réunions peuvent également cacher de bonnes idées dans lesquelles vous pourrez piocher. En prenant compte de tous ces éléments dans la version suivante et en mobilisant progressivement de plus en plus d’intervenants, vous obtiendrez une meilleure adhésion de votre livrable final et accélérez ainsi les temps de validation.

Cerise sur le gâteau (à négocier) : Le travail préparatoire. Lorsque vous percevez qu’un élément est particulièrement stratégique pour l’entreprise, tentez de négocier un travail préparatoire dans lequel vous vous offrirez plus de latitude dans votre démarche (renforcer les bases théoriques, le recueil d’informations, la constitution des livrables annexes,etc.). La qualité finale n’en sera évidemment que meilleure.

Analyse éclair

  • S’assurer la prise en compte de vos recommandations (au moins les plus importantes)
  • Détecter les erreurs de conception réalisées en dehors de votre intervention
  • Détecter vos erreurs de conception
  • Éviter les dérives

Est-ce encore de l’ergonomie ?

Vous vous reposez une nouvelle fois la question ? La réponse est encore oui, même si vous n’avez qu’une heure pour votre inspection. Vous connaissez les ficelles et vous avez une bonne connaissance des attentes du client et de l’équipe projet (objectifs d’utilisabilité, objectifs de communication, etc.).

Et sans vouloir encore vous mettre de la crème, vous êtes le mieux placé pour faire ça vite et bien. Vous êtes l’expert ! Il faut par contre bien communiquer sur le niveau de qualité qui en résulte. Il ne faut pas s’attendre au top dans des conditions pareilles !

Le garde-fou d’une conception minimaliste

Si les développeurs ont besoin de faire valider leur code par des tests, l’équipe projet et le client finiront par comprendre que vous ne faites pas exception à cette règle. Ils vous ont demandé l’impossible en concevant rapidement, vous devez avoir l’opportunité de détecter les erreurs.

L’équilibre à trouver sera cette fois entre le nombre d’interventions et le moment de les réaliser.

Trop ou trop peu d’interventions, aucun excès n’est bon. Comme nous l’avons vu précédemment, vous avez certainement peu de temps à consacrer à l’analyse. Si vous réalisez beaucoup d’inspections, vous augmenter les opportunités de voir des erreurs mais vous réduisez potentiellement la qualité de chacune (à cause du manque de temps). A contrario, si vous réalisez peu d’inspections, vous réduisez les opportunités mais augmentez la qualité de chaque itération. Regardez les moments clés du projet où vous pouvez intervenir de manière pertinente et faites votre choix du nombre.

Trop tôt ou trop tard, comment savoir ? Si vous intervenez seulement au début, c’est que vous pouvez compter sur une équipe projet et un client rompus à la conception orientée utilisateur, ce qui semble rester encore rare. Si vous intervenez uniquement à la fin, la plupart de vos recommandations risquent de sembler ou d’être effectivement trop chère à prendre en compte. De nombreuses étapes intermédiaires entre la conception et le produit final donnent l’opportunité de prendre des décisions de conception complémentaires : Maquette graphique, prototype, version bêta. Si vous n’intervenez pas, un principe erroné risque d’être validé et repris comme base de conception dans les itérations suivantes. C’est la dérive !

Cerise sur le gâteau (à négocier) : Le test utilisateur. Comme déjà évoqué plus haut, il s’agit d’un atout à sortir lorsque vous percevez qu’un élément est particulièrement stratégique pour l’entreprise. Vous obtiendrez des résultats essentiels pour votre travail et la qualité final du produit.

Voir aussi :

4 Commentaires

  • Très intéressantes observations de la démarche ergonomique en entreprise, d’autant qu’il y a des solutions.

    Quand l’ergonomie peut être un enjeu important dans le processus de développement, il est important de s’en donner les moyens!

  • F.X. Ponce dit :

    Pour éviter d’être mis à l’écart du projet, une seule solution : identifier rapidement les projets naissants et communiquer auprès d’eux pour argumenter la nécessité d’un budget ergonomie et estimer avec eux celui-ci. Dans le cas contraire, il sera inexistant ou sous-estimé, et alors trop tard ensuite pour pouvoir agir.

  • Je rejoins Nicolas sur l’importance des maquettes qui permettent de concrétiser nos interventions, et surtout de celle du travail en équipe intégrée avec les développeurs, le graphiste et le marketing. Un projet réussi est un projet où l’ergonome trouve sa place dans l’équipe de développement, sinon son rôle d’expert risque d’être mal perçu et peu compris par les équipes.

    L’ergonome logiciel ne peut se passer d’un contact direct avec les utilisateurs finaux, mais pour être véritablement efficace dans le projet, il lui faut aussi être en relation directe avec les équipes de développement.

    Qui plus est, lorsqu’il est intégré dans l’équipe, l’ergonome intervient en conception lors des itérations sur les maquettes. L’activité d’évaluation est moindre, car elle se fait de manière implicite au travers des échanges informels avec le reste de l’équipe. Elle est donc beaucoup mieux perçue.

    Je ne pense pas que le travail préparatoire doive être considéré comme la “cerise sur le gâteau”. Au contraire, il doit être mené systématiquement en début de projet car il va servir de ligne directrice à l’ensemble de la conception de l’interface.

    Mais rien n’empêche de faire simple ! Une visite chez les utilisateurs finaux du produit peut permettre de dégrossir beaucoup et d’éviter des erreurs. Ici aussi, il faut jouer collectif et y aller à plusieurs, si possible avec le chef de projet, voire avec les développeurs. Cela va permettre de partager une vision commune du contexte utilisateur tout au long du projet.

    Pour finir, une remarque de détail sur le vocabulaire, ce que vous appelez Analyse correspond à la phase dite d’évaluation. Je joins à titre indicatif, le schéma présentant les 3 phases de la démarche ergonomique :

    • L’analyse correspond ici aux phases amont d’enquête et observation auprès des utilisateurs finaux, appelé aussi : “enquête terrain”,
    • La conception représente les phases de maquettage-prototypage de l’interface,
    • L’évaluation regroupe les phases d’audit et de test utilisateur visant à valider l’ergonomie de l’interface.
  • Marc Van Rymenant dit :

    Je suis 100% d’accord avec Jean-François sur la nécessité de bien définir les rôles, responsabilités et compétences dans une équipe projet.

    Par contre attention aux techniques d’analyse des utilisateurs :

    • premier problème : si vous observez un utilisateur en fait vous n’observerez que le résultat d’un comportement à 95% inconscient. Vous ne verrez que la partie visible de l’iceberg !

    • second problème : vos conclusions de l’observation ne serons qu’une interprétation filtrée par votre propre cerveau de ce que vous aurez compris des 5% du comportement des utilisateurs.

    Les sciences comportementales permettent de s’attarder sur les 95% du comportement et de prédire celui-ci afin de construire des interfaces efficaces.

    Pour faire de l’ergonomie à coût réduit et obtenir des résultats business l’avenir se trouve dans l’utilisation d’outil de prédiction.

    Voici un exemple d’outil, provenant de nos ErgoTools, utilisé par nos experts en sciences comportementales pour prédire la vision périphérique d’un être humain face à une interface : http://farm4.static.flickr.com/3058

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